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Bibliodiversité : pour l’édition indépendante

Le 21 septembre, c’est la Journée internationale de la bibliodiversité.

En 2014, Susan Hawthrone lançait un cri d’alarme qui est toujours d’actualité. À l’heure des fusions et rachats qui ont mené à une extrême concentration et à la financiarisation du secteur du livre, et à l’heure du numérique qui laisse entrevoir une nouvelle ère « d’autoédition de masse », elle s’inquiète pour la diversité des idées et des créations. « Peu enclins à l’originalité, à la prise de risque, à l’inventivité, les poids lourds de l’édition mondialisée ne se préoccupent pas de soutenir les livres audacieux et pertinents dans leur message, susceptibles de devenir des références pour les générations à venir. Ils ne se soucient que de chiffres, de conformité et s’attachent à répéter la formule qui a engendré le dernier best-seller. »

Susan Hawthorne est écrivaine et éditrice féministe en Australie, où elle est l’une des fondatrices de Spinifex Press. Son livre souligne le poids des conditions de production dans la possibilité d’existence d’œuvres et d’idées autres que celles produites par les grandes structures et plaide pour l’édition indépendante, plus à même de prendre des risques pour promouvoir des textes originaux.

 

Nouvel écosystème

Le terme de bibliodiversité a été proposé par des éditeurs chiliens dans les années 1990 et repris notamment par l’Alliance internationale des éditeurs indépendants à sa création en 2002. Susan Hawthrone l’enrichit de sa réflexion à la fois sur la biodiversité et sur la trajectoire du mouvement féministe pour faire entendre une voix autre dans un univers masculin. Elle rappelle que Virginia Woolf, publiant ses œuvres dans la maison d’édition qu’elle avait créée avec son mari, avait ainsi pu contourner la frilosité des éditeurs de son époque vis-à-vis des écrivaines. Elle souligne le parallèle entre l’oppression des femmes et le maintien dans d21es marges difficilement viables de créations par les poids lourds du secteur.

Au-delà du plaidoyer contre l’uniformisation, elle insiste sur la nécessité d’inventer un nouveau modèle économique, qui éviterait les gaspillages liées à la distribution de masse et allongerait au-delà de trois mois l’espérance de vie des livres.

Kenza Sefrioui

Bibliodiversité, manifeste pour une édition indépendante | Susan Hawthorne, traduit de l’anglais par Agnès El Kaïm | Éditions Charles Léopold Mayer | 128 p. | 9 €

21 septembre 2018