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Pourquoi la culture est la solution ?

MARSAD (Mediterranean Action and Research for Sustainability And Development) ouvre la voie à une action conjointe de la société civile dans la région MENA.

La société civile en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, comme dans d’autres régions du monde en particulier des « pays du sud », s’est emparée depuis quelques années de nombreuses problématiques sociales, économiques, culturelles, éducatives ou politiques. En effet, devant l’absence d’intervention ou/et la défaillance de l’État, certaines associations se sont données comme mission de participer à la mise en œuvre de politiques publiques de développement efficaces mais également de les observer, de les évaluer et d’élaborer des recommandations à l’État pour des réformes, le cas échéant.

MARSAD est une initiative qui s’inscrit dans cette démarche. Elle est née de la rencontre et de la collaboration de quatre organisations de la société civile de la région : Racines (Maroc), Notre Culture d’abord (Tunisie), ElMadina (Egypte) et Me’zaf (Liban). Ces structures, connues et reconnues sur leurs territoires respectifs et au-delà, partagent un engagement pour les politiques culturelles de leur pays mais également pour la culture comme outil de changement social positif, de démocratie, de stimulation de l’esprit critique, de vivre ensemble, de liberté d’expression…

Pendant une année, les quatre partenaires se sont rencontrés à Casablanca, Beyrouth, Tunis et Alexandrie, et ont partagé leurs expériences, ensemble et avec les acteurs culturels dans les pays respectifs. Chaque association dispose d’une histoire unique en tant qu’intervenant dans les politiques culturelles. Racines, après avoir réalisé la cartographie culturelle au Maroc (www.artmap.ma), effectué une enquête sur les pratiques culturelles des Marocains (www.pratiquesculturelles.ma) et organisé deux « États généraux de la culture » en 2014 et 2016, propose une méthodologie de plaidoyer à ses partenaires, qui à leur tour l’adapteront à leurs contextes nationaux. Dans la Tunisie post-Printemps Arabe, il existe un dynamisme culturel sans précédent, essentiellement porté par le secteur indépendant, à la fois en terme de création artistique et de participation à l’élaboration des politiques culturelles tunisiennes. À l’opposé, en Égypte, la situation des ONG – en particulier celles qui œuvrent dans la culture, les libertés publiques et individuelles ou les droits humains – se complique de plus en plus, en raison de l’interventionnisme de l’État, son contrôle permanent des ressources et ses législations de plus en plus liberticides. Au Liban, le contexte politique et la structure sociale communautaire, rendent difficile le travail de collecte de données à travers le pays, de statistiques ou d’élaboration de politiques culturelles inclusives.

Le résultat concret de ces 12 mois de travail, a été la production de deux outils. Le premier est la plateforme et banque de données collective (www.marsad-observatory.org) de recherche, d’évaluation et d’observation des politiques culturelles dans la région MENA. À terme, il s’agit d’en faire un véritable « Observatoire régional des Politiques Culturelles » fournissant des ressources documentaires et statistiques sur la région pour le développement d’un plaidoyer auprès des institutions publiques pour des politiques culturelles efficaces et adaptées aux citoyens, aux artistes et aux professionnels de la culture. Le second outil est une publication, intitulée Pourquoi la culture est la solution ?, co-écrite par les partenaires tunisiens, égyptiens, libanais et marocains. Elle dresse l’état des lieux des politiques culturelles dans ces quatre pays et apporte un éclairage supplémentaire sur leur développement humain, social et économique, tout en proposant des recommandations pour l’intégration de la culture dans les politiques publiques de développement. La publication inclut également des témoignages de citoyens sur leurs pratiques culturelles et de success stories de projets culturels et artistiques, portés par des professionnels.

Mais au-delà de cette année d’étroite collaboration, les quatre structures sont conscientes qu’il reste beaucoup à faire. Elles ont identifié de nombreux défis à relever, en tant qu’acteurs de la société civile méditerranéenne et des pays du Sud de manière générale. MARSAD est le début d’un travail conjoint de cette société civile, un porte-voix pour amplifier le débat public sur les politiques culturelles et leur rôle dans la démocratie, la citoyenneté, la justice sociale, l’éducation, les droits humains, les droits des artistes, la liberté d’expression citoyenne ou médiatique, la coopération internationale, etc. En résumé, il s’agit d’apporter des éléments de réponse à la question « Pourquoi la culture est la solution ? » dans nos sociétés contemporaines, dans un contexte social, économique et politique de plus en plus compliqué voire violent.

Dounia Benslimane

5 décembre 2017