La littérature marocaine en anglais
Postdoctorante de la British Academy à la School of Oriental and African Studies à Londres et autrice du blog Machaho Tellem Chaho, dédié à la littérature algérienne, la chercheuse Nadia Ghanem fait dans le site Arablit.org l’inventaire de la littérature marocaine des XXème et XXIème siècles disponible en anglais.
Beaucoup de lecteurs et de librairies organisent leurs piles de livres, leurs étagères et leurs lectures par pays, celui-ci oscillant entre le pays d’origine de l’auteur et le lieu où se déroule l’histoire. C’est une approche de la littérature que j’ai toujours trouvée étrange et agréable : il y a un plaisir particulier à se concentrer un moment sur la littérature d’un lieu.
Je pourrais dire que ma tendance à me concentrer sur un pays est le point de départ de cette liste, mais ce serait mentir. À dire vrai, après m’être profondément attachée à la littérature algérienne, j’ai simplement eu envie de regarder où en étaient ses voisines en matière de traduction. Ma liste de littérature algérienne en traduction anglaise consacrait des années de lectures et tentait de saisir la production littéraire algérienne hors de son ancrage géographique. Au contraire, cette liste-ci se fait au début de mon voyage, de l’extérieur vers l’intérieur.
La liste ci-dessous compte 172 titres. Il y a 106 romans, nouvelles (en recueils ou uniques) et pièces de théâtre ; 37 poèmes ou recueils de poésie ; 21 biographies et essais, et 12 ouvrages collectifs – dont Marrakesh Noir, dirigé par Yassin Adnan chez Akashic Books, un recueil qui rend accessibles en anglais 11 auteurs traduits nulle part ailleurs.
Je ne peux m’empêcher de comparer cette liste à mon point de départ, l’Algérie. Je suis frappée par le fait que la littérature marocaine est beaucoup plus disponible en traduction anglaise. Mais quand on regarde par auteur, ce nombre diminue fortement : en fait, seuls 52 auteurs sont traduits, du moins dans les catégories du roman, de la nouvelle et des biographies. Seuls 40 ont un livre intégralement traduit. Pour les 12 autres, seul un extrait est traduit. Je ne tiens pas compte de la poésie, car de nombreux poèmes ont été traduits à l’unité et que peu de recueils d’un seul auteur sont disponibles en anglais. J’espère que les titres et les auteurs qui m’ont échappé, et ceux qui vont émerger, viendront doubler ce nombre, même si j’en doute.
Au Maroc comme en Algérie, la fiction est toujours largement écrite en arabe et en français, beaucoup moins en tamazight, mais les auteurs marocains sont plus nombreux à écrire directement en anglais que les auteurs algériens. Il m’aurait fallu du temps pour comprendre ce phénomène, mais il se trouve que mon intérêt a été suscité par la parution de l’article de Hisham Aidi « Alors pourquoi ai-je défendu Paul Bowles ? », discussion qui a produit le déclic pour traduire en anglais de nombreux ouvrages de fiction. Sans surprise, bien moins de livres de Marocaines que de leurs homologues masculins sont traduits, et le nombre de romans, de nouvelles et de poésie traduits de l’arabe est faible.
Je n’ai jusqu’à présent trouvé aucune traduction en anglais antérieure à 1964, date de la publication de A Life Full of Holes de Driss ben Hamed Charhadi, enregistrée et traduite par Paul Bowles, chez Weidenfeld & Nicolson. Sachant que le premier roman d’Assia Djebar a été traduit dès 1956 et que l’Afrique du Nord a alors attiré l’attention des éditeurs anglophones, je suppose qu’une œuvre de fiction a pu être traduite avant 1960 mais ne l’ai pas encore découverte. Si vous avez des informations à ce sujet, partagez-les.
À présent, par où aborder la fiction marocaine ? La fiction récemment traduite, brillante et nouvelle, est toujours attrayante, et 2020 s’annonce comme une année passionnante pour la fiction marocaine en traduction, avec la publication prochaine de pas moins de neuf romans, recueils de poésie et œuvres de non-fiction. Cela commencé en janvier par la réédition du roman de Driss Chraibi The Simple Past, traduit par Hugh Harter (NYRB) et la traduction de l’essai de Leila Slimani Sex and Lies (Faber & Faber) en février 2020. À paraître également The Punishment de Tahar Ben Jelloun, traduit par Linda Coverdale (Yale University Press, avril 2020) ; Tazmamart (Tazmamort) de Aziz BineBine, traduit par Lulu Norman (Haus Publishing, avril 2020) ; The Butcher of Casablanca de Abdelillah Hamdouchi, traduit par Peter Daniel (Huppe fasciée, 5 mai 2020) ; The King’s Fool de Mahi Binebine traduit par Ben Faccini (MacLehose Press, 6 août 2020), et Straight from the Horse’s Mouth de Meryem Alaoui, traduit par Emma Ramadan (Penguin Random, septembre 2020). Fin avril sortira Conditional Citizens: On Belonging in America de Laila Lalami (Penguin Random House USA, 28 avril 2020), écrit en anglais, et en mai est promis Emergency! de Mohamed Hmoudane, traduit par Peter Thompson.
Alors, rendez-vous dans la fiction marocaine, où le confinement ne peut pas nous atteindre.
La liste, mode d’emploi
Ci-dessous, je recense essentiellement des œuvres littéraires : romans, nouvelles, pièces de théâtre, poésie et biographies.L’essai de non-fiction est inclus, même si cela ouvre un écueil que je souhaite éviter. La liste se divise en quatre parties :
- a) romans, nouvelles, pièces de théâtre
- b) poésie
- c) biographies/essais et
- d) ouvrages collectifs.
Chaque partie est ainsi organisée : par auteur, en ordre alphabétique, puis par année de publication des œuvres, la plus récente d’abord. La langue originale du livre est indiquée entre crochets [AR = arabe ; EN = anglais ; FR = français ; SP = espagnol ; TZT = tamazight]. Dans la première partie (roman, nouvelles, pièces de théâtre), le genre est également indiqué entre crochets.
Si des erreurs et omissions sont repérées et me sont signalées, j’en serai très reconnaissante.
Nadia Ghanem
Traduction en français par Kenza Sefrioui
Pour découvrir l’intégralité de la liste et lire l’article original en anglais, c’est ici.